Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/235

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par M. Cousin, et où Pascal a déposé, sur des pages brûlantes, le secret impénétrable de son cœur ! Pour lui, comme pour Platon, l’amour est un feu surnaturel, et il y a quelque chose de la divinité, dans l’objet aimé. « Le premier effet de l’amour, dit-il, est d’inspirer un grand respect. L’on a de la vénération pour ce que l’on aime… Il semble que l’on ait toute une autre âme, quand on aime… On s’élève par cette passion, et l’on devient toute grandeur. » Ailleurs, Pascal s’écrie : « À mesure qu’on a plus d’esprit, les passions sont plus grandes !… Dans une grande âme tout est grand. On demande s’il faut aimer : cela ne se doit pas demander, on le doit sentir… L’amour n’a point d’âge ; il est toujours naissant… Le cœur a ses raisons que la raison ne connoît pas. » Platon n’eût pas désavoué ce langage.

Pascal est rapproché de Saint-Évremond, quand il ajoute : « Le plaisir d’aimer, sans l’oser dire, a ses peines, mais aussi il a ses douceurs. Dans quel transport n’est-on point, de former toutes ses actions dans la vue de plaire à une personne que l’on estime infiniment ! L’on s’étudie tous les jours pour trouver le moyen de se découvrir, et l’on y emploie autant de temps que si l’on devoit entretenir celle que l’on aime. Les yeux s’allument et s’éteignent dans un même moment ; et, quoique l’on ne voie pas que celle qui cause tout ce désordre y prenne garde, l’on a néanmoins la satisfaction de sentir tous ces remuements pour une personne qui le mérite si bien. » Dans le curieux écrit de Pascal, il est souvent parlé des délicats, et il abonde assez volontiers dans quelques-uns de leurs sentiments. Saint-