Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/467

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La théologie me semble fort considérable, comme une science qui regarde le salut ; mais, à mon avis, elle devient trop commune, et il est ridicule que les femmes même osent agiter des questions qu’on devroit traiter, avec beaucoup de mystère et de secret. Ce seroit assez pour nous d’avoir de la docilité et de la soumission. Laissons cette doctrine tout entière à nos supérieurs, et suivons, avec respect, ceux qui ont le soin de nous conduire. Ce n’est pas que nos docteurs ne soient les premiers à ruiner cette déférence, et qu’ils ne contribuent à donner des curiosités qui mènent insensiblement à l’erreur. Il n’y a rien de si bien établi chez les nations, qu’ils ne soumettent à l’extravagance du raisonnement. On brûle un homme assez malheureux pour ne pas croire en Dieu ; et cependant on demande publiquement, dans les écoles, s’il y en a un. Par là, vous ébranlez les esprits faibles, vous jetez le soupçon dans les défiants : par là, vous armez les furieux, et leur permettez de chercher des raisons pernicieuses, dont ils combattent leurs propres sentiments, et les véritables impressions de la nature.

Hobbes, le plus grand génie d’Angleterre2, depuis Bacon, ne sauroit souffrir qu’Aristote


2. Voy. dans le Dictionnaire de Bayle, l’article de Hobbes, que Saint-Évremond voyoit souvent, à Londres.