Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/476

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injures, et accusa les dieux, de la mort de son mari2 :

Et dit aux astres innocents
Tout ce que fait dire la rage,
Quand elle est maîtresse des sens3.

Mais, ne trouvant pas que l’horreur de l’impiété pût être assez forte, dans une âme outrée de douleur, il garde pour sa dernière raison à lui représenter l’intérêt de ses appas ; comme s’il n’y avoit plus aucun remède à son mal, que la considération du tort qu’elle fait à sa beauté :

Que vous ont fait ces beaux cheveux,
Dignes objets de tant de vœux,
Pour endurcir votre colère ?
Et devenus vos ennemis,
Recevoir l’injuste salaire
D’un crime qu’ils n’ont point commis ?

Il pardonnoit aux femmes d’être impies, d’être insensées ; il ne leur pardonnoit pas de s’être rendues moins aimables. C’est le crime


2. Artémise, qui avoit perdu Mausole, roi de Carie, son époux.

3. Ces vers sont de Malherbe, dans l’Ode qui a pour titre : Consolation à Caritée sur la mort de son mari. Ménage, dans ses Observations sur les poésies de Malherbe, dit que cette Caritée étoit une dame de Provence de grand mérite et d’une beauté extraordinaire. Mais M. de Saint-Évremond nous apprend ici, que Malherbe composa cette ode pour Marie de Médicis, après la mort