Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/99

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oublié aujourd’hui, mais qui méritoit peut-être de ne l’être pas, M. Esprit, y excelloit, et même il y faisoit autorité. Mme de Sablé s’y est appliquée toute sa vie et y recueilloit des succès de société ; Saint-Évremond, intimement lié avec le frère et les deux fils de Mme de Sablé, paya aussi son tribut à la mode régnante. Un déluge de Maximes parut vers ce temps-là4. L’invention et la rédaction des Maximes fit longtemps partie de la belle éducation, et Mme de Maintenon ne manqua pas d’y former le jeune duc du Maine, son élève. On en trouve de la façon de ce prince, dans les Œuvres diverses d’un auteur de sept ans, si connues des curieux. Bayle vante cet exercice comme donnant beaucoup de solidité à l’esprit. Dans les salons où régnoit le goût de ces bluettes littéraires, les formules de Maximes passoient de main en main ; chacun y mettoit sa part d’esprit, d’observation et même de rédaction, et l’œuvre finissoit par appartenir à tout le monde. C’est ainsi qu’on rencontre, dans plusieurs ouvrages contemporains, des sentences toutes faites, dont on peut constater l’identité avec les Maximes de divers auteurs, arrivées jusqu’à nous, et même avec celles de La Rochefoucauld5.

Mme de Sablé étoit, de naissance, Madeleine de Souvré, d’une grande et ancienne famille. Son père avoit été gouverneur de Louis XIII. Un de ses frères étoit le célèbre commandeur de Souvré, gourmet raffiné, immortalisé à ce titre par Boileau,


4. Voy. M. Cousin, Madame de Sablé, pag. 180 et suiv. ; et M. Paulin Paris, sur Tallemant, III, pag. 155.

5. Voy., par exemple, les Mémoires de Hollande.