Page:Œuvres poétiques de François de Maynard, 1885, tome 1.djvu/298

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O parole trompeuse ! ô perfide beauté !
O ciel de mille appas, enfer de cruauté
Toutesfois esperons, possible que son ame
Se brusle ainssi que may d’une amoureuse flame.


Scène 4

Silvie, Tirsis, Silvandre.
Silvie

Que me sert de me plaindre et pleurer nuit et jour ?
Nommer cruels les Dieux et plus cruel Amour ?
Que me sert de lascher mille traits de ma veue,
Pour toucher de pitié le berger qui me tue ?
Son ame est insensible et plus il void mes yeux
Tout ruisselants de pleurs, et mon cœur soucieux
Pousser mille soupirs avecque ma parole,
Et tristement gemir soubs le dueil qui m’afole,
Moins ployable à mes vaux qu’un superbe rocher,
Il est sourd à ma plainte, et craint de m’approcher.
Mille douces faveurs, chastement departies,
Au lieu du fruit d’Amour ont produit des orties.
D’un injuste mepris si je pleure il se rit,
Et il m’hait si je l’aime, et son ame cherit
Celle qui le mesprise : ô juste recompense !
Mais vivray-je tousjours soubs son obeissance !