Page:Œuvres politiques de Machiavel.djvu/431

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dre une défaite, parce que l’intention des Carthaginois devait être seulement de prouver aux Romains qu’ils étaient assez braves pour les combattre ; et que, puisqu’ils avaient été victorieux, il ne fallait pas s’exposer à perdre tout le fruit de leur triomphe dans l’espoir d’en obtenir un plus grand. On rejeta cet avis ; mais le sénat de Carthage en connut toute la sagesse quand il eut laissé perdre l’occasion.

Alexandre le Grand était maître de tout l’Orient. La république de Tyr, illustre et puissante à cette époque, et bâtie comme Venise au sein des mers, voyant la puissance du conquérant, envoya des ambassadeurs lui annoncer que les Tyriens consentaient à se soumettre, et à lui rendre l’obéissance qu’il exigerait d’eux ; mais qu’ils ne voulaient recevoir dans leurs murs ni lui ni ses armées : Alexandre indigné qu’une seule ville osât fermer ses portes à celui devant lequel toutes les cités de la terre les avaient ouvertes, chassa les députés de sa présence ; et, rejetant leur prière, il vint mettre le siége devant Tyr. La ville était située au milieu des eaux, et munie de vivres et de tout ce qui pouvait être nécessaire à sa défense. Au bout de quatre mois, Alexandre s’aperçut que cette ville enlevait plus de temps à sa gloire que n’en avaient exigé toutes ses autres conquêtes : il résolut alors de traiter avec elle, et de lui accorder ce qu’elle avait elle-même demandé. Mais les Tyriens, enorgueillis, refusèrent d’écouter ses propositions, et ils égorgèrent même celui qui était venu les leur apporter. La colère d’Alexandre monta à son comble ; et il poussa le siége avec tant d’opiniâtreté, qu’il emporta la ville et la ravagea, après en avoir livré tous les habitants à la mort et à l’esclavage.

En 1512, une armée espagnole pénétra sur le territoire de Florence pour rétablir les Médicis dans cette ville et y lever des contributions : des citoyens eux-mêmes avaient attiré les étrangers, en leur faisant espérer que,