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XI
NICOLAS MACHIAVEL.

peu trop pastoral en avançant qu’une inclination vive et partagée était le mobile de ce mariage. Quoi qu’il en soit, il ne paraît pas que la dot de Mariette ait été considérable.

Dans les premières années qui suivirent son mariage, Machiavel, tout en remplissant les devoirs de sa charge, s’occupait d’études historiques, de poésie pour lui-même et ses amis, et d’organisation politique ou militaire pour la république de Florence. En 1505, il conçut le projet de substituer aux condottieri une armée nationale. Ce projet, soumis à l’office des Dix, fut approuvé, et l’année suivante on chargea officiellement Machiavel de procéder au recrutement ; mais il rencontra dans l’exécution des difficultés presque insurmontables ; car placé en dehors et en avant de son siècle, il parlait de patriotisme là où le sentiment de la patrie n’existait que dans quelques âmes d’élite, là où des partis toujours prêts à se déchirer ne pouvaient pas former une armée, par cela même qu’ils ne formaient point une nation. L’homme de la renaissance indiquait la route, et tentait de la suivre, mais sans pouvoir lui-même arriver au but. Ce fut en vain qu’il rédigea des instructions pour organiser la milice nationale, provizzione per instituire milizie nationali ; ce fut en vain que l’office des Dix créa les neuf officiers de la milice florentine ; qu’il leur donna le droit de faire des levées d’hommes au nom du tout-puissant Seigneur et de sa glorieuse mère, sainte Marie, toujours vierge, et du glorieux précurseur du Christ, Jean-Baptiste, avocat, protecteur et maître de la république. Les Dix, en décrétant une armée italienne, n’étaient que des Gibelins, qui ordonnaient à leurs tambours de battre des marches empruntées aux Allemands, c’est-à-dire aux sujets de l’empereur. Machiavel, l’homme de l’Italie moderne, parlait encore à l’Italie du Dante.

Diverses missions à Pise, à Sienne, dans les domaines de la république et en France occupèrent le secrétaire florentin de 1506 à 1511. Il fut en outre chargé de quelques levées d’hommes et d’une inspection des forteresses florentines. Cette période de sa vie paraît avoir été tranquille et douce. Dans les rares instants de loisir que lui laissaient ses fonctions, il vivait à la campagne et se distrayait du repos par des études littéraires ; mais en 1511 sa santé jusqu’alors fort robuste s’altéra sensiblement, et craignant sans doute