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XI

Pour la première fois, en février 1792, la presse distingua, par leurs noms propres, les fractions de l’Assemblée : Feuillants, Indépendants, Patriotes- Jacobins (parti de Brissot) et la Montagne (1). Les députés de la Gironde formaient déjà un parti, qui, pour l’avenir, se préparait à enlever aux Feuillants leur dernière force. Narbonne, Duport-Dutertre et Cahier de Gerville (2) étaient feuillants à divers degrés ; l’influence de ces ministres devait bientôt céder à celle des Girondins, plus avancés, républicains de cœur, alors décidés à l’action révolutionnaire.

Le directoire de Paris se composait de feuillants, presque en totalité. Le procureur-général-syndic Rœderer était feuillant. Celui-ci eut l’occasion, plus tard, de sauver Louis XVL II fournissait des articles au Journal de Paris.

Mais le parti feuillant avait eu le dessous dans les élections municipales. Le parti de la Gironde gagnait du terrain, et, lui aussi, s’adressait à une classe de citoyens opposés aux Jacobins et aux Cordeliers. Les Feuillants et les Girondins étaient unis dans l’intérêt commun de la bourgeoisie ; mais les Feuillants pensaient que la bourgeoisie ne pouvait triompher qu’avec l’appui des classes privilégiées contre le peuple, et les Girondins estimaient que ce triomphe dépendrait d’une alliance avec le peuple contre les classes privilégiées. Souvent, les députés de ces deux partis votaient ensemble. De même que les émigrés en 1792, les Feuillants invoquaient le salut du roi, ce qui les rendait odieux au peuple. A mesure que le courant devenait plus révolutionnaire, leurs principes constitutionnels avaient moins de chance de succès. Les émigrés voyaient en eux, malgré tout, une sorte de Jacobins voulant ménager les modérés ; le peuple les confondait avec les étrangers. Quoi qu’ils tentassent pour le bien de la Cour, pour l’affermissement du trône, Louis XVI et son entourage n’avaient aucune confiance en eux. Ils se proclamaient sans cesse purs constitutionnels, honnêtes gens au suprême degré ; mais le peuple les accusait de trahison à son égard. Les Feuillants se (1) Patriote français, numéro du 24 février 1792. (2) Vcrgiiiaud, Ducos et Graugcncuve le harcelaient saus cesse, le trouvaient tiède. Il quitta le ministère le 15 mars 1792 ; il était dépopularisé.