Page:Abbadie - Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie.djvu/341

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
333
DANS LA HAUTE-ÉTHIOPIE

comprend le clergé, les cultivateurs, les trafiquants et les industriels, et, au-dessus, celle des hommes de guerre, qui exercent le pouvoir. Ceux-ci exploitent, pressurent, ruinent la portion stable et foncière. Les citadins et les cultivateurs surtout s’épuisent à subvenir aux besoins d’une population errante de gens de guerre oisifs, turbulents et dépensiers, investis annuellement par le Polémarque du droit de pressurer des vassaux, et les traitant d’autant plus âprement que leur autorité est révocable et passagère.

L’Empire éthiopien était divisé en polémarchies, diverses par leur étendue et leur importance, et conférant à celui qui en était investi un titre de polémarque, celui de Ras, de Dedjazmatch ou autre. On a vu que ces Polémarques n’étaient à l’origine que des chefs militaires, qui, sitôt la campagne finie, ne conservaient que des pouvoirs insignifiants. Conformément à l’us féodal, qui veut que la terre confère sa valeur à l’homme, depuis la chute de l’Empire, ceux qui ont pris possession de ces polémarchies, n’importe par quels moyens, ont pris en même temps les titres et les insignes honorifiques dont étaient revêtus leurs prédécesseurs régulièrement investis.

Pour devenir Polémarque, il suffit d’être investi d’une polémarchie par un Polémarque d’un ordre supérieur dont on devient le vassal, ou bien il faut s’être emparé par la force d’une polémarchie. Les mœurs militaires veulent que, dans le cas où un homme qui n’est pas encore Polémarque s’empare d’une polémarchie, il n’en prenne le titre qu’après s’être rendu maître des timbales de son rival ou de celles d’un autre Polémarque. Les titres de Ras, Dedjazmatch et autres Polémarques sont à la fois des dignités et des grades ; ils sont personnels, in-