Page:Abbadie - Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie.djvu/412

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
404
DOUZE ANS DE SÉJOUR

en renvoyer un autre à ses fils. Il leur avait adressé des promesses et des encouragements ; mais il ne leur accordait ni le ban d’investiture ni le droit de déport, et ces deux jeunes gens, entourés de l’armée de leur père, attendaient dans une attitude hostile. Ces événements tenaient en suspens presque toute l’Éthiopie, et plus particulièrement le Dambya, l’Agaw-Médir, le Damote et le Gojam, c’est-à-dire, après le Bégamdir les pays les plus étendus de la mouvance du Ras.

En présence de ces graves préoccupations, la mésintelligence entre le Ras Ali et son Fit-worari perdait de son importance. Néanmoins, la Waïzoro Manann, voyant le chagrin de sa fille qui dépérissait de jour en jour, fit proposer au Dedjadj Guoscho de se porter en médiateur entre le Ras et Birro. Le Ras accepta cette médiation, et, de concert avec sa mère, il invita le Dedjadj Guoscho à venir sur-le-champ à Dabra Tabor, afin de s’entendre au sujet de Birro et sur la meilleure conduite à tenir dans les circonstances importantes où le pays se trouvait. Birro supplia son père de ne point commettre sa personne chez leur suzerain qui méditait, disait-il, de les envelopper dans une commune disgrâce ; et en même temps qu’il le poussait à se déclarer indépendant, il activait pour son compte ses préparatifs de rébellion. Quoiqu’il fût le moins important parmi les personnages alors en vue, le bruit se faisait surtout autour de son nom et semblait l’annoncer comme le principal acteur dans les événements qui allaient suivre. La manière imprévue dont il avait été en quelque sorte imposé à son père, au Ras et même à la Waïzoro Manann, ses succès si rapides remportés en dehors des règles ordinaires de la prudence, l’impunité avec laquelle il avait pu agir, comme on l’a vu, au milieu de l’armée du Ras et à sa cour, la