Page:Abelard Heloise Cousin - Lettres I.djvu/185

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tre Philippe pour le convertir à la foi dont il s’était rendu digne par ses prières et par la lecture assidue des livres saints. Bien plus, comme, pendant son voyage, il était toujours occupé de cet objet, la grâce divine, malgré l’anathème porté contre les riches et les gentils, permit qu’il tombât sur un passage qui fournit à l’Apôtre le moyen le plus favorable d’opérer sa conversion.

Afin donc que rien ne vous empêche d’accueillir ma demande et n’en relarde l’exécution, je m’empresse de formuler et de vous envoyer le texte même de la prière que je vous conjure d’adresser humblement au Seigneur pour nous.


« Dieu, qui, dès le commencement de la création, avez, en tirant la femme d’une côte de l’homme, établi le grand sacrement du mariage, vous qui l’avez honoré et élevé si haut, soit en vous incarnant dans le sein d’une femme, soit en commençant vos miracles par celui des noces de Cana, vous qui avez jadis accordé ce remède, suivant vos vues, à mon incontinente faiblesse, ne repoussez point les prières de votre servante ; je les verse humblement aux pieds de votre divine majesté pour mes péchés et pour ceux de mon bien-aimé. Pardonnez, ô Dieu de bonté, que dis-je ? ô Dieu qui êtes la bonté même, pardonnez à nos crimes si grands, et que l’immensité de votre ineffable miséricorde se mesure à la multitude de nos fautes. Je vous en conjure, punissez les coupables en ce monde, épargnez-les dans l’autre. Punissez-les dans cette vie d’un jour, afin de ne les pas punir dans l’éternité. Armez-vous contre vos serviteurs de la verge de la correction, non du glaive de la colère. Frappez la chair pour conserver les âmes. Venez en pacificateur, non en vengeur, avec bonté plutôt qu’avec justice, en père miséricordieux, non en maître sévère.

« Éprouvez-nous, Seigneur, et tentez-nous, ainsi que le Prophète le demande pour lui-même, comme s’il disait en termes ouverts : Examinez d’abord mes forces, et mesurez à ce qu’elles peuvent supporter le fardeau des tentations. C’est ce que saint Paul promet à vos fidèles, lorsqu’il dit : « Dieu, qui est la puissance même, ne souffrira pas que vous soyez éprouvé au delà de ce que vous pouvez ; mais il accroîtra vos forces avec la tentation, afin que vous puissiez la soutenir.

« Vous nous avez unis, Seigneur, et vous nous avez séparés quand et comme il vous a plu. Achevez aujourd’hui miséricordieusement ce que vous avez miséricordieusement commencé. Ceux que vous avez séparés l’un de l’autre, pour un jour, dans ce monde, unissez-les à vous pour l’éternité dans le ciel, ô notre espérance, notre partage, notre attente, notre consolation, Seigneur, qui êtes béni dans tous les siècles ! Ainsi soit-il. »

Salut en Jésus-Christ, épouse de Jésus-Christ ; en Jésus-Christ salut, et vie en Jésus-Christ. Ainsi soit-il.