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QUESTIONS D’HÉLOtSE ET RÉPONSES DABÉLARD. 431

reçut en naissant d’une vierge, ainsi qu’il est écrit : « Le Verbe s’est fait chair. » Le sang offert dans le corps, c’est la Passion, à laquelle nous devons tous prendre part, nous tous qui sommes ses membres. D’où il esl écrit : « I.e Christ a souffert pour nous, nous laissant un exemple* dont nous de- vons suivre la trace. » Lors donc que saint Grégoire dit : « Il ne nous eût servi de rien de naître, s’il ne nous eût servi de rien d’être rachetés, et si notre rachat n’eût été accompli dans la Passion de Jésus, ainsi qu’il le fait entendre lui-même en mourant : « Tout est accompli ; » ce n’est pas sans raison que le sang répandu passe avant la conception de la chair, c’est-à- dire la Passion avant la naissance. Et ce corps, il a pu être plus justement appelé le corps du nouveau Testament que le sien, c’est-à-dire la confirma- tion de la prédication évangélique, puisque, ainsi que le dit l’Apôtre : « L’alliance a été confirmée par la mort. » L’Évangile est-il autre chose, en effet, que le testament de l’amour, de même que la Loi avait été le tes- tament de la crainte ? L’Apôtre ne dit-il pns aux Juifs convertis : « Vous n’êtes plus soumis dans la crainte ? » et ailleurs : « La fin de la Loi est la charité d’un cœur pur ; » et la Vérité ne dit-elle pas elle-même : « Jo suis venu apporter le feu sur la terre, et dans quel but, sinon pour qu’il brûle ? »

Cette loi d’amour, c’est donc la Passion du Seigneur qui Ta particu- lièrement confirmée, puisque, en mourant pour nous, il nous a donné la preuve d’une tendresse sans égale. Aussi dit-il lui-même : « Il n’est per- sonne qui ait une tendresse si grande qu’il donne sa vie pour ceux qu’il aime. » Il a confirmé le testament en ceci encore, qu’il a persévéré, au prix de la mort, dans l’enseignement de la prédication évangélique, et qu’il a niontreenmourant.ee qu’il ne pouvait faire eu naissant. C’est ainsi que celui qui prépare un testament pour ses héritiers le confirme en persévérant dans sa volonté première jusqu’à la mort : n’en rien effacer, n’en rien cor- riger, c’est en fortifier la teneur. Il y avait donc lieu de dire, je le répète, le sang plutôt que le corps du Seigneur, comme symbole du nouveau Tes- tament.

Quant à ce qui suit : i Je ne boirai plus du jus de la vigne jusqu’au jour où j’en tairai de nouveau avec vous dans le royaume de mon Père, i je l’entends en ce sens : je ne célébrerai plus, dans le sacrifice, la Passion de mon corps, avant de faire un sacrifice nouveau avec vous dans le rojaume de mon Père. Sacrifice nouveau, parce qu’il renouvelle ceux qui le font dans la plénitude de laHbi, changent le vieil homme, le transforment, ches ceux qui sont prêts à suivie le Seigneur jusqu’à la mort par esprit d’obéissance.

Et tels n’étaient pas les disciples de ce temps-là : ils étaient alors parti* culièrement faibles dans la foi, ils n’appartenaient pas à Dieu ; et Dieu ne régnant pas eu eux, ils n’étaient pas vraiment soumis à son empire. En effet ;