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DE LA LIBERTÉ ET DE PLUSIEURS AUTRES CHOSES.

Il y avait autrefois une langue française. Elle n’était pas aussi pompeuse que l’espagnol des Castillans, ni aussi douce que l’italien de Toscane, ni aussi riche en subtilités métaphoriques que l’Allemand de Kant et de Hegel ; mais elle avait le plus rare et le plus précieux de tous les mérites : elle était claire. La diplomatie l’adopta, de préférence à toutes les autres, dès l’année 1648, un demi-siècle avant la naissance de Voltaire, lorsque Racine n’était qu’un gamin de neuf ans, la Fontaine un petit provincial inconnu, et Molière un comédien ambulant, aussi obscur que misérable. Cette langue, à peu près fixée par l’honnête Vaugelas, qui achevait alors de vivre, eut la gloire de devenir européenne, parce que l’Europe entière était comme éblouie de sa limpidité. Elle portait partout la lumière avec elle ; elle dissipait les équivoques comme un soleil d’été dissipe les brouillards du matin.