Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/108

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inhérentes et qui se manifestent d’elles-mêmes, sans l’impulsion d’aucun principe étranger, pourvu qu’elles se trouvent dans certaines conditions de milieu. Pourquoi les muscles de M. Fougas ne se contractent-ils pas encore ? Pourquoi le tissu du cerveau n’entre-t-il pas en action ? Parce qu’ils n’ont pas encore la somme d’humidité qui leur est nécessaire. Il manque peut-être un demi-litre d’eau dans la coupe de la vie. Mai je ne me hâterai pas de la remplir : j’ai trop peur de la casser. Avant de donner un dernier bain à ce brave, il faut encore masser tous ses organes, soumettre son abdomen à des pressions méthodiques afin que les séreuses du ventre, de la poitrine et du cœur soient parfaitement désagglutinées et susceptibles de glisser les unes sur les autres. Vous comprenez que le moindre accroc dans ces régions-là, et même la plus légère résistance, suffirait pour tuer notre homme dans l’instant de sa résurrection. »

Tout en parlant, il joignait l’exemple au précepte, et pétrissait le torse du colonel. Comme les spectateurs remplissaient un peu trop exactement la salle de bain, et qu’il était presque impossible de s’y mouvoir, M. Nibor les pria de passer dans le laboratoire. Mais le laboratoire se trouva tellement plein qu’il fallut l’évacuer au profit du salon : les commissaires de la société de biologie avaient à peine un coin de table où rédiger le procès-verbal.