Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/176

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

cabrer son cheval anglais et saluait l’assistance avec la pointe de l’espadon.

M. du Marnet, blond, fort, assez velu, modelé comme le Bacchus indien et non comme l’Achille, laissait voir sur son front un léger nuage d’ennui. Il ne fallait pas être magicien pour comprendre que ce duel in naturalibus, sous les yeux de ses propres officiers, lui semblait inutile et même ridicule. Son cheval était un demi-sang percheron, une bête vigoureuse et pleine de feu.

Les témoins de Fougas montaient assez mal ; ils partageaient leur attention entre le combat et leurs étriers. M. du Marnet avait choisi les deux meilleurs cavaliers de son régiment, un chef d’escadron et un capitaine commandant. Le juge du camp était le colonel Rollon, excellent cavalier.

Au signal qu’il donna, Fougas courut droit à son adversaire en présentant la pointe du sabre dans la position de prime, comme un soldat de cavalerie qui charge les fantassins en carré. Mais il s’arrêta à trois longueurs de cheval et décrivit autour de M. du Marnet sept ou huit cercles rapides, comme un Arabe dans une fantasia. M. du Marnet, obligé de tourner sur lui-même en se défendant de tous côtés, piqua des deux, rompit le cercle, prit du champ et menaça de recommencer la même manœuvre autour de Fougas. Mais le revenant ne l’attendit pas. Il s’enfuit au grand galop, et fit un tour d’hippo-