Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/238

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mains et même un cardinal célèbre, mais il y manquait un revenant. Elle écrivit donc à Fougas un billet tout petillant d’impatience et de curiosité pour le prier à souper chez elle. Fougas, qui partait le lendemain pour Dantzig, prit une feuille de papier grand-aigle et se mit en devoir de s’excuser poliment. Il craignait, ce cœur délicat et chevaleresque, qu’une soirée de conversation et de plaisir dans la compagnie des plus jolies femmes de l’Allemagne, ne fût comme une infidélité morale au souvenir de Clémentine. Il chercha donc une formule convenable et écrivit :

« Trop indulgente beauté, je… » La muse ne lui dicta rien de plus. Il n’était pas en train d’écrire, il se sentait plutôt en humeur de souper. Ses scrupules se dissipèrent comme des nuages chassés par un joli vent de nord-est ; il endossa la redingote à brandebourgs, et porta sa réponse lui-même. C’était la première fois qu’il soupait depuis sa résurrection. Il fit preuve d’un bel appétit et s’enivra quelque peu, mais non pas comme à son ordinaire. La baronne de Marcomarcus, émerveillée de son esprit et de sa verve intarissable, le garda le plus longtemps qu’elle put. Et maintenant encore, elle dit à ses amis en leur montrant le portrait du colonel : « Il n’y a que ces officiers français pour faire la conquête du monde ! »

Le lendemain, il boucla une malle de veau noir