Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/41

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

du larynx. Mais les yeux, fermés sans contraction, étaient beaucoup moins caves qu’on n’aurait pu le supposer ; la bouche ne grimaçait point comme la bouche d’un cadavre ; la peau, légèrement ridée, n’avait pas changé de couleur : elle était seulement devenue un peu plus transparente et laissait deviner en quelque sorte la couleur des tendons, de la graisse et des muscles partout où elle les recouvrait d’une manière immédiate. Elle avait même pris une teinte rosée qu’on n’observe pas d’ordinaire sur les cadavres momifiés. M. le docteur Martout expliqua cette anomalie en disant que, si le colonel avait été desséché tout vif, les globules du sang ne s’étaient pas décomposés, mais simplement agglutinés dans les vaisseaux capillaires du derme et des tissus sous-jacents ; qu’ils avaient donc conservé leur couleur propre, et qu’ils la laissaient voir plus facilement qu’autrefois, grâce à la demi-transparence de la peau desséchée.

L’uniforme était devenu beaucoup trop large ; on le comprend sans peine ; mais il ne semblait pas à première vue que les membres se fussent déformés. Les mains étaient sèches et anguleuses ; mais les ongles, quoique un peu recourbés vers le bout, avaient conservé toute leur fraîcheur. Le seul changement très-notable était la dépression excessive des parois abdominales, qui semblaient refoulées au-dessous des dernières côtes ; à droite, une légère