Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/85

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Il fallait que le changement fût bien visible, car Mlle Sambucco, qui n’avait pas des yeux de mère, s’en inquiéta.

M. Martout, persuadé que cette maladie de l’âme ne céderait qu’à un traitement moral, vint la voir un matin et lui dit :

« Ma chère enfant, quoique je ne m’explique pas bien le grand intérêt que vous portez à cette momie, j’ai fait quelque chose pour elle et pour vous. Je viens d’envoyer à M. Karl Nibor le petit bout d’oreille que Léon a détaché. »

Clémentine ouvrit de grands yeux.

« Vous ne me comprenez pas ? reprit le docteur. Il s’agit de reconnaître si les humeurs et les tissus du colonel ont subi des altérations graves. M. Nibor, avec son microscope, nous dira ce qui en est. On peut s’en rapporter à lui : c’est un génie infaillible. Sa réponse va nous apprendre s’il faut procéder à la résurrection de notre homme, ou s’il ne reste qu’à l’enterrer.

— Quoi ! s’écria la jeune fille, on peut décider si un homme est mort ou vivant, sur échantillon ?

— Il ne faut rien de plus au docteur Nibor. Oubliez donc vos préoccupations pendant une huitaine de jours. Dès que la réponse arrivera, je vous la donnerai à lire. J’ai stimulé la curiosité du grand savant : il ne sait absolument rien sur le fragment que je lui envoie. Mais si, par impossible, il nous disait que ce bout d’oreille appartient à un être sain, je le prie-