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LE PAYS.

pas l’habitude de voir des caravanes, aboyaient du haut de leur tête ; les femmes accouraient à leurs portes, les filles à leurs fenêtres et nous riaient vertement au nez. Grâce au zèle de nos conducteurs, nous n’avons pas mis plus d’une demi-heure à traverser la ville, qui est grande comme la rue de Poitiers ; mais les habitants se souviendront longtemps d’une journée si fertile en émotions, et, si jamais Égine a une histoire, notre passage y fera époque.

Le village que nous quittions est à deux heures du temple, si l’on marche à pied ; il faut un peu plus de temps si l’on est à cheval. Jugez si les chemins sont bons ! Mais cette route est si variée qu’on y marcherait toute la vie sans se lasser : tantôt elle suit le versant d’une montagne rude et escarpée ; tantôt elle descend dans des ravins immenses, peuplés d’arbres de toute espèce et revêtus de grandes fleurs sauvages que nos jardins devraient envier. Quelques énormes figuiers tordent leurs bras puissants au milieu des amandiers au feuillage grêle ; on rencontre çà et là des orangers d’un vert sombre, des pins roussis par l’hiver, des cyprès aux formes bizarres ; et, d’espace en espace, le roi des arbres, le palmier, élève sa belle tête échevelée. Dorez tout ce paysage d’un large rayon de soleil ; semez partout des ruines anciennes et modernes, des églises sur tous les sommets, sur tous les versants des maisons turques, carrées comme des tours, couronnées de terrasses et proprement blanchies à la chaux, sur les chemins, de petites troupes d’ânes portant des familles entières ; dans les champs, des troupeaux de brebis ; des bandes de chèvres sur les rochers ; çà et là quelques vaches