Page:About - La Question romaine.djvu/125

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Il n’en a pas besoin pour arriver à son but ; car enfin que veut-il ? Dans quel espoir est-il descendu des montagnes de Sonnino ? Croyez-vous en bonne foi qu’il songeât à devenir le bienfaiteur de la nation ? ou le sauveur de la papauté ? ou le don Quichotte de l’Église ? Pas si sot ! Il s’intéressait premièrement à sa personne, deuxièmement à sa famille.

Sa famille va bien. Ses quatre frères, Philippe, Louis, Grégoire et Ange (passez-moi le mot) ont porté des chôches lorsqu’ils étaient jeunes ; ils portent aujourd’hui tous ensemble et parallèlement la couronne de comte. L’un est gouverneur de la Banque, excellente affaire. On lui a donné le mont-de-piété, depuis la condamnation du pauvre Campana. Un autre est conservateur de Rome, sous un sénateur choisi pour sa nullité, c’est-à-dire adjoint d’une commune où le maire ne compte pas. Un autre exerce publiquement le métier d’accapareur, avec de grandes facilités pour interdire ou autoriser l’exportation, selon que ses magasins sont pleins ou vides. Le plus jeune est le commis-voyageur, le diplomate, le messager de la famille, angelus domini. Le comte Dandini, simple cousin, règne à la police. Ce petit monde manie, déplace, augmente une fortune invisible, insaisissable et incalculable. On ne les plaint pas à Sonnino.

Quant au secrétaire d’État, les hommes et les femmes qui le connaissent dans l’intimité assurent unanimement que sa vie est douce. N’était l’ennui de tenir tête aux diplomates et de donner audience tous les matins,