Page:About - La Question romaine.djvu/47

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mauvaise herbe, ce beau sentiment de la dignité humaine, qui est le principe de toutes les vertus.

Il faut que la race italienne ait le sang bien généreux pour qu’une notable partie de la plèbe romaine ait gardé ses mâles vertus. J’ai rencontré dans le Transtevère des hommes simples, grossiers, violents, terribles quelquefois, mais véritablement hommes ; chatouilleux dans leur honneur, au point de tuer net celui qui leur manque de respect. Ils sont ignorants comme le peuple des Monts ; ils ont reçu les mêmes leçons et assisté aux mêmes exemples ; ils ont la même imprévoyance, la même ardeur au plaisir, la même brutalité dans leurs passions ; mais ils ne sont pas capables de se courber, même pour ramasser quelque chose.

Un gouvernement digne de gouverner tirerait parti de cette force ignorante. Il faudrait la dompter d’abord et la diriger ensuite. Tel joue du couteau dans les cabarets, qui ferait un admirable soldat sur le champ de bataille ; mais nous sommes dans la capitale du pape. Les Transtévérins ne s’attaquent ni à Dieu ni au gouvernement ; ils ne se mêlent ni de religion ni de politique, c’est tout ce qu’on leur demande. Et, pour prix de leur sagesse, une administration paternelle leur permet de s’égorger entre eux.

Ni les Transtévérins, ni le peuple des Monts ne donnent signe de vie politique, et les cardinaux s’en frottent les mains : ils s’admirent d’avoir entretenu tant d’hommes dans une profonde ignorance de tous leurs droits. Je ne suis pas bien sûr que la spéculation soit heureuse.