Page:About - La Question romaine.djvu/78

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villa Pamphili. Ils se promèneront longtemps, ils se promèneront beaucoup, à pied, à cheval, en voiture, avec une canne, une cravache ou un lorgnon dans la main, jusqu’à ce qu’on les marie. Assidus à la messe, fidèles au théâtre, vous les verrez sourire, bâiller, applaudir et faire le signe de la croix, sans passion. Presque tous sont inscrits sur les listes d’une ou deux confréries dévotes, ils ne sont d’aucun club. Ils jouent timidement, n’entretiennent point de danseuse, boivent sans enthousiasme et ne se ruinent jamais à faire courir. Conduite exemplaire et qu’on ne saurait trop louer ; mais les poupées qui disent papa et maman ne se débauchent pas non plus.

Un beau matin, ils ont vingt-cinq ans. À cet âge, un Américain a fait dix métiers, quatre fortunes, une faillite, deux campagnes, plaidé un procès, prêché une religion, tué six hommes à coups de révolver, affranchi une négresse, et conquis une île. Un Anglais a passé deux thèses, suivi une ambassade, fondé un comptoir, converti une catholique, fait le tour du monde et lu les œuvres complètes de sir Walter Scott. Un Français a rimé une tragédie, écrit dans deux journaux, reçu trois coups d’épée, essayé deux suicides, contrarié quatorze maris et changé dix-neuf fois d’opinion politique. Un Allemand a balafré quatorze de ses amis intimes, avalé soixante tonnes de bière et la philosophie de Hegel, chanté onze mille couplets, compromis une servante, fumé un million de pipes et trempé dans deux révolutions. Le prince romain n’a rien fait, rien vu, rien ap-