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PEINTURE DE GENRE

faut-il pas avant tout frapper la foule, contraindre l’attention d’un public d’autant plus incompétent qu’il est plus nombreux, tirer à soi les yeux ignorants et voraces du suffrage universel ?

Cette fatalité navrante, lorsqu’elle n’éloigne pas du Salon des artistes de premier ordre, comme Meissonier, fait dévier certains talents des plus originaux et des plus sympathiques. Je vous demande un peu pourquoi M. Bastien-Lepage, le plus jeune des peintres arrivés, le plus divers dans son inépuisable production et non pas le moins original de sa fournée, s’est imposé la tâche de peindre une espèce de Labre avant la canonisation, un mendiant vulgaire, vicieux, haineux et sale, et dans quel intérêt ce peintre délicat jusqu’aux derniers raffinements nous présente, sur le plat d’or de son exécution merveilleuse, des haillons, des sabots, des volets, des murs de village, tout cela grand comme nature ? Du temps qu’il y avait encore une Académie des beaux-arts, il y a un demi-siècle, l’Institut faisant fonc-