Page:Abregé de la vie des peintres (Roger de Piles, Muguet, 1699).djvu/103

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éxpreſſions vagues. J’en pourrois nommer auſſi de fort habiles, dont les Deſſeins paroiſſent eſtantez, quoy que ſavans & ſpirituels ; parce que leur main étoit retenuë par leur jugement, & qu’ils ſe ſont attachez préférablement à toutes choſes, à la juſteſſe de leurs contours, & à l’éxpreſſion de leur ſujet. Mais je croy qu’il eſt mieux de ne nommer perſonne, & d’en laiſſer le jugement aux autres.

On peut dire à la loüange de la Liberté, qu’elle eſt ſi agréable, qu’elle couvre ſouvent, & fait éxcuſer beaucoup de défauts, leſquels on attribuë plutôt à une impétuoſité de veine, qu’à l’inſuffiſance. Mais il faut dire auſſi que la Liberté de main ne paroît preſque plus Liberté, quand elle eſt renfermée dans les bornes d’une grande régularité, encore qu’elle y ſoit effectivement. C’eſt ainſi que dans les Deſſeins de Raphaël les plus arrêtez, il y a une Liberté délicate qui n’eſt bien ſenſible qu’aux yeux ſavans.

Enfin il y a des Deſſeins où il ſe rencontre peu de correction, qui ne laiſſent pas d’avoir leur mérite ; parce qu’il y a beaucoup d’Eſprit & de Caractére. On peut mettre ſous cette eſpéce les Deſſeins de Guillaume Baur, ceux de