Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/110

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qu’une morte, s’élança de selle, et Belle-Rose et le coursier fumant roulèrent sur l’herbe. Belle-Rose n’entendit qu’un cri, ne sentit qu’un coup et s’évanouit. Quand il revint à lui, il était couché sur un sofa dans une grande pièce magnifiquement meublée. Son premier geste fut de porter sa main à son front ; une vive douleur répondit au contact de ses doigts.

– Oui, oui, vous êtes blessé ! Il s’en est fallu d’un demi-pouce que le fer du cheval n’atteignît la tempe ! Adonis a été adroit dans sa maladresse.

Belle-Rose pencha la tête pour voir la personne qui parlait, et reconnut la dame qu’il venait de tirer d’un si grand péril. Il voulut se relever pour la remercier des soins qu’elle avait pris de lui.

– Tenez-vous tranquille, reprit-elle, vous n’êtes point en état de remuer avec la plaie que vous avez à la tête et la saignée qu’on vous a faite au bras.

Belle-Rose s’aperçut seulement alors qu’il avait le bras gauche entouré de ligatures. Il sourit et reporta ses yeux sur la dame qui était devant lui assise dans un grand fauteuil. Son habit de cheval, déchiré en trois ou quatre endroits, était tacheté de sang ; elle-même portait le bras en écharpe ; ses cheveux défaits tombaient en longues tresses brunes autour de son visage, où rayonnaient des yeux merveilleusement beaux. Au milieu des sensations confuses où son âme se débattait, il semblait au jeune sous-officier que ce n’était pas la première fois que le son de cette voix frappait son oreille ; mais il ne pouvait se rappeler ni en quel lieu ni en quelle circonstance il l’avait entendue. Quant au visage de la dame, il lui était tout à fait inconnu. Au sourire de Belle-Rose, elle répondit par un sourire ; mais il y avait dans le mouvement de ses lèvres, d’un dessin ferme et net, quelque chose d’amer et de dédaigneux qui en altérait la grâce.

– Je comprends, reprit-elle, vous n’avez rien senti, ni la chute, ni le coup de pied, ni le transport au château