Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/12

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– Ne vous mettez pas en peine de l’âge ; fournissez-moi seulement le cheval, et vous verrez.

L’étranger sourit, puis il ajouta :

– Il est rétif et plein de feu…

– J’ai bon bras et bon œil, il peut courir…

– Viens donc ; le cheval n’est pas loin.

L’inconnu et Jacques quittèrent la prairie et entrèrent dans un petit bois. Tout au milieu, derrière un fourré, Jacques aperçut un cheval qui piaffait en tournant autour d’un ormeau auquel il était attaché. Un frein lié sur ses naseaux l’empêchait de hennir. Jacques n’avait jamais vu un si bel animal, même dans les écuries de M. de Malzonvilliers. Il s’approcha du cheval, lui caressa la croupe, dénoua le frein qui l’irritait, et s’apprêtait à sauter en selle, quand l’étranger lui mit doucement la main sur l’épaule.

– Avant de partir, lui dit-il, au moins faut-il que tu saches où tu dois aller.

– C’est juste, répondit Jacques, qui avait déjà le pied à l’étrier.

L’impatience de galoper sur un si fier cheval lui avait fait oublier le but de la course.

– Tu sais sans doute où est le petit village de Witternesse ?

– Très bien : à une lieue à peu près, sur la droite, du côté d’Aire.

– C’est là que tu vas te rendre ; maintenant retiens bien ceci : avant d’entrer à Witternesse, tu verras sur la gauche une ferme au bout d’un champ de seigle. Il y a quatre fenêtres avec une girouette en queue d’aronde sur le toit. Tu frapperas trois coups à la porte ; au troisième coup, tu prononceras à haute voix le nom de Bergame ; un homme sortira et tu lui remettras ce papier…

En achevant ces mots, l’inconnu tira de sa poche un petit portefeuille, prit un crayon et se mit en devoir d’écrire.

– Sais-tu lire ? demanda-t-il brusquement à Jacques.