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Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/142

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qu’elle reconnut au premier coup d’œil. Elle comprit clairement alors la question de Belle-Rose ; mais sans s’arrêter à en calculer la portée, elle appela, et des laquais l’aidèrent à transporter leur maîtresse dans son appartement. Les événements qui avaient amené cette catastrophe s’étaient si brusquement succédé, que Mme de Châteaufort ne put résister à leur impétuosité. Cette femme, énergique et forte, qui savait commander aux circonstances, semblait brisée d’un seul coup. Elle resta plusieurs heures roide et glacée, les cheveux épars autour de son front ; la vie se trahissait seulement par les larmes qui tombaient une à une de ses paupières entr’ouvertes et par les tressaillements de son visage, où se reflétaient toutes les angoisses de la terreur et du désespoir. Mme de Châteaufort était arrivée dans l’après-midi à Paris, à son hôtel, et n’avait pris que le temps de changer de vêtements pour se rendre en fiacre à la maison de la rue Cassette. M. d’Assonville s’y était présenté la veille et le jour même. Mme de Châteaufort envoya chez lui, il était sorti ; mais, sur l’avis qu’on lui donna qu’il devait rentrer dans la soirée, elle pria un laquais de l’informer qu’il était attendu rue Cassette. Malheureusement M. d’Assonville s’étant, de son côté, rendu à l’hôtel de Mme de Châteaufort, peu d’instants avant l’arrivée de la duchesse à Paris, apprit d’un valet qu’elle était dans l’intention de prolonger son séjour à la campagne. Son parti fut pris sur-le-champ ; il connaissait le parc et ses issues secrètes, les passages qui conduisaient aux appartements de la duchesse, et, bien convaincu par son silence qu’elle était fermement décidée à éviter toute entrevue, il voulut essayer d’arriver la nuit jusqu’à elle, au risque d’y périr. Au moment donc où Mme de Châteaufort entrait dans Paris, M. d’Assonville en sortait. Lorsqu’il aperçut Écouen, il s’arrêta et attendit la nuit, ne voulant point se présenter devant la grille du château de la duchesse, pensant qu’il serait éconduit. Aux premières ombres, il gagna les murs du parc, se cacha dans