Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/149

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dit la Déroute… Mais patience, tout n’est pas fini.

– Il s’en manque de trois ou quatre jours, je crois.

– Entre la veille et le lendemain, il y a place pour un projet.

– Que veux-tu dire ?

– Suffit… je m’entends. Nous n’avons pas le loisir de causer dans ce corridor… Je vais d’abord vous caser dans un lieu dont je n’ouvre jamais la serrure sans appliquer un coup de poing contre la porte.

– Le cachot ?

– Précisément. Je cours chez le capitaine, et si j’obtiens de commander les hommes de garde, je suis content.

– Demande-le-lui de ma part, il y consentira.

– Parbleu, j’y pensais. Marchons vite, nous aurons tout le temps de causer après.

Au bout de cinq minutes, la porte du cachot s’ouvrit sur Belle-Rose. C’était une salle basse attenante à la caserne des artilleurs. Les fenêtres étaient grillées et garnies en outre de gros barreaux. L’une d’elles avait vue sur le chemin de ronde, où se promenait un soldat le mousquet sur l’épaule.

Belle-Rose sourit.

– Voilà une résidence judicieusement choisie. On n’en sort que pour entrer dans l’éternité.

– Bah ! qui sait ! murmura la Déroute.

Le prisonnier le regarda ; au moment où il allait parler, le caporal l’arrêta.

– Chut ! il y a des oreilles, dit-il en désignant d’un geste la porte où s’étaient groupés trois ou quatre artilleurs. Asseyez-vous, je cours et je reviens.

La Déroute pressa la main de son camarade et sortit. Belle-Rose entendit les verrous grincer dans leur gâche et sonner sur les dalles du perron le mousquet d’une sentinelle. Les dernières paroles du caporal occupaient son imagination ; il s’assit sur le bord d’un mauvais lit de camp et laissa tomber sa tête entre ses mains.