Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/265

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La Déroute ne fit qu’une traite de Paris à Douai, où l’armée s’était transportée. M. de Luxembourg avait poussé du côté de la Belgique par le Limbourg. Pierre fut la première personne à laquelle la Déroute put apprendre la mésaventure arrivée à Belle-Rose. Pierre, à l’audition de ce récit, jeta son mousquet contre terre avec tant de violence, qu’il en rompit la crosse.

– Cours chez l’Irlandais, je cours chez M. de Nancrais, lui dit-il.

M. de Nancrais songea à M. de Luxembourg ; Cornélius songea à Mme de Châteaufort. L’un connaissait l’honneur du gentilhomme, l’autre avait mis à l’épreuve le cœur de la femme. Deux heures après, M. de Nancrais partait pour le Limbourg et Cornélius pour Arras. Au nom de Cornélius Hoghart, Mme de Châteaufort donna ordre d’introduire le jeune Irlandais auprès d’elle. La duchesse se tenait au fond d’un oratoire où pénétrait un jour douteux ; elle était vêtue d’une longue robe sans ornement qui cachait son cou et ses bras. Son visage avait les teintes mates de l’ivoire, et deux cercles bleuâtres s’arrondissaient sous ses paupières alanguies. Un pâle sourire entr’ouvrit ses lèvres à la vue de Cornélius.

– Qui vous amène ? lui dit-elle ; allez-vous me donner la joie de penser que je puis vous être bonne à quelque chose ?

– Non, pas à moi, mais à un autre, madame.

– Parlez ! reprit la duchesse, qui avait le nom de Belle-Rose à la bouche et n’osait le prononcer.

– Belle-Rose est arrêté.

– Arrêté ! dites-vous ? s’écria Mme de Châteaufort en attachant ses regards effarés sur Cornélius.