Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/339

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– Vous êtes une noble créature, et vous m’auriez rendu meilleur, dit-il.

M. de Pomereux fit prier la supérieure de vouloir bien l’entendre une minute ; elle vint, et il lui demanda de communiquer à Mme d’Albergotti la nouvelle dont il était porteur ; après quoi il sortit en toute hâte. Comme il traversait la cour intérieure, il entendit un cri déchirant. Son cœur sauta dans sa poitrine.

– Mon Dieu ! murmura-t-il, je crois que si trente femmes ne m’avaient pas un peu usé de ce côté-là, je finirais par aimer celle-ci.


Le cri qu’avait entendu M. de Pomereux était bien le cri de Suzanne au moment où elle avait appris la mort supposée de Belle-Rose. La mère Évangélique la lui avait annoncée froidement, et Suzanne, brisée d’un seul coup, était tombée sur le carreau. La supérieure appela deux sœurs qui transportèrent la pauvre affligée dans sa chambre, où elle demeura plusieurs heures sans donner aucun signe de vie. Quand elle se réveilla comme d’un long sommeil, les pleurs ruisselèrent de ses yeux, et si on l’eût entourée dès ce moment-là, Mme d’Albergotti eût certainement pris le voile. Vers le soir, son âme éperdue se rattacha à une espérance qui, dans la nuit de son désespoir, brillait comme une lueur vacillante. Il lui semblait que, dans sa cruelle narration, la supérieure avait exprimé vaguement un doute sur la réalité de la mort de Belle-Rose. Cette pensée se développa aussitôt qu’elle fut née et la saisit tout entière.