Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/475

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la Déroute qui descendait de cheval en costume de piqueur.

– C’est encore toi ! s’écria-t-il, ne sachant s’il devait rire ou gronder.

– C’est toujours moi. Quand je vous ai vu partir, mes jambes n’y ont pas tenu ; elles sont entrées toutes seules dans de grosses bottes qui étaient par là ; mes bras, de leur côté, se sont fourrés dans la souquenille d’un piqueur qui dormait à la façon du cocher que vous savez ; je me suis trouvé son chapeau sur la tête sans savoir comment il y était venu, et tandis que je réfléchissais à cette métamorphose, mes pieds se sont dirigés vers l’écurie où était le cheval du brave garçon. Je les ai laissés faire, si bien qu’au bout d’un instant je me suis vu en selle ; le cheval est parti tout seul ; j’ai pensé que c’était la Providence qui le voulait ainsi, et voilà comme j’ai galopé jusqu’à Mantes.

À mesure que le récit de la Déroute s’avançait, la colère de Belle-Rose, qui, à vrai dire, n’était pas bien grande, s’en allait.

– Et le piqueur ? demanda-t-il.

– Oh ! il dort à côté du cocher.

Suzanne avait trouvé la lettre de Belle-Rose. Elle ne contenait que peu de mots. Belle-Rose la prévenait qu’un devoir, dont l’accomplissement ne pouvait pas être plus longtemps retardé, l’appelait à dix ou douze lieues de l’abbaye.

« Ne craignez rien, lui disait-il en finissant, je ne cours aucun danger ; notre amour me protège, et vous me reverrez d’ici à trois ou quatre jours. »

Suzanne communiqua cette lettre à Cornélius, qui ne put lui donner aucune espèce d’explication sur le motif de cette absence. Cornélius regrettait seulement de n’avoir pas été averti.

– Au moins, dit-il, serais-je parti avec lui.