Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/526

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aboutir. Le roi y a vu un attentat contre la religion, et vous savez quelle est son humeur sur ce chapitre-là. J’ai dû me taire, espérant qu’on vous oublierait. Mais voici la guerre, Belle-Rose ; l’épée peut tout conquérir.

– J’essayerai, dit Belle-Rose avec un fier sourire.

– Et les occasions ne te manqueront pas, ami Jacques, reprit le duc, que la vue de Belle-Rose faisait plus jeune de dix ans. On m’a conté des choses de toi qui prouvent assez que ta main ne s’est pas engourdie durant la paix. Fais ce que tu dois, et tu seras le plus fort. Tu es parmi nous, restes-y ; l’armée est une grande famille, et tous les soldats sont frères. Viens à moi si l’on t’inquiète, et dussé-je y laisser mon épée, tu resteras sauf dans mon camp.

M. de Luxembourg ouvrit les dépêches que M. de Nancrais lui avait apportées ; son œil s’alluma tandis qu’il les parcourait et ses joues s’enflammèrent.

– C’est la guerre ! messieurs, s’écria-t-il d’une voix vibrante. Le roi passe ses troupes en revue ; quant à nous, nous passerons bientôt la frontière.

Quand Belle-Rose et M. de Nancrais sortirent, ils trouvèrent des groupes d’officiers qui les attendaient à la porte de la résidence. À la nouvelle que la guerre était à la veille d’éclater, ce furent parmi ces braves gentilshommes mille cris d’enthousiasme. La nouvelle se répandit comme une étincelle électrique dans le camp, semant partout l’ivresse ; les soldats mettaient leurs chapeaux au bout des baïonnettes et s’embrassaient. Quand vint le soir, des feux s’allumèrent sur toute la ligne, et le camp présenta l’aspect d’une grande fourmilière de soldats qu’agitait une ardeur fiévreuse. Ce qu’avait prévu M. de Luxembourg arriva : les officiers qui avaient servi avec Belle-Rose dans le même corps d’armée en 1668, l’accueillirent comme un frère d’armes et le présentèrent à leurs nouveaux camarades. Au besoin, le capitaine eût trouvé cinquante épées pour