Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/532

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de Thermes, le duc de Coislin, le prince de Marcillac, et plusieurs autres de la première noblesse du royaume. On apercevait sur la rive opposée trois escadrons de Hollandais rangés en bataille ; dans la tour de Tolhus, les canonniers étaient à leurs pièces, la mèche allumée. À peine eut-on fait dix pas dans le fleuve, que la Déroute se frappa le front.

– Bon ! s’écria-t-il, c’est un gué !

Il avait compris la parabole.

– Eh bien ! lui dit Belle-Rose, crois-tu que l’Évangile ait raison ?

La troupe, qui se composait d’une quarantaine de personnes, avançait en riant aux éclats.

– Au moins, si nous mourons, mourrons-nous gaiement, dit M. de Pomereux.

Les cuirassiers, plus pesamment armés, restaient un peu en arrière ; les volontaires, ardents et bien montés, marchaient les premiers. Tantôt on avançait à gué ayant de l’eau jusqu’aux sangles ; tantôt on nageait ayant de l’eau jusqu’à la ceinture. Les escadrons de M. de Revel se rangeaient sur le rivage, prêts à partir au premier signal.

– Voilà un soldat déterminé ! dit le prince de Condé. Voyez, il est en tête.

– Oh ! il arrivera ! il arrivera ! répétait M. de Luxembourg, à qui il tardait de pouvoir se lancer dans le Rhin.

Vers le milieu du fleuve, un cuirassier perdit pied tout à coup et disparut emporté par le flot ; un peu après, ce fut le tour d’un garde du corps. Dix pas plus loin, le cheval d’un volontaire s’abattit sur M. de Pomereux, qui chancela ; mais, d’une saccade violente, le comte redressa son cheval, qui, frappé d’un coup d’éperon, pirouetta sur ses jarrets et sauta par-dessus la croupe de son voisin ; le volontaire et son cheval roulèrent dans l’eau, le fleuve passa sur leur tête et on ne les vit plus.

– En avant ! cria le comte.