Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/79

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de bien prendre garde à la mine des gens qui viendraient le demander. Ces manières gagnèrent le cœur de l’hôtelier ; il ôta son bonnet.

– Mon gentilhomme, dit-il, j’ai, quoique vieux, des yeux pour voir, des oreilles pour entendre, une langue pour parler. Vous serez servi à souhait.

– C’est bien. Apprenez seulement que je ne suis pas gentilhomme.

– Tant pis ; des gens faits comme vous méritent d’être marquis de naissance.

– Vous m’appellerez Belle-Rose.

– Je vous appellerai comme vous voudrez ; mais vous ne m’empêcherez pas de dire, si vous n’êtes vraiment pas ce que je supposais, que le sort s’est conduit comme un malotru.

Belle-Rose roula un manteau autour de ses épaules, glissa la plus petite des trois lettres dans sa poche et sortit.

– C’est égal, dit l’hôtelier en le suivant de l’œil tandis qu’il longeait les murailles de la rue du Pot-de-Fer-Saint-Sulpice, il a voulu se déguiser, c’est son affaire ; mais on ne m’ôtera pas de l’idée que c’est un grand seigneur. Quelle tournure !

Cette exclamation répondait au cri de sa pensée. Celui-là disait : Quel louis !

Les choses arrivèrent comme M. d’Assonville l’avait annoncé à Belle-Rose. La porte basse ne s’ouvrit qu’au troisième coup ; une femme, embéguinée dans une coiffe qui lui descendait par devant jusqu’aux yeux, et par derrière jusqu’à la nuque, parut sur le seuil. Elle lança sur Belle-Rose un regard vif qui l’embrassa de la tête aux pieds, puis baissa les yeux, croisa les bras sur un petit surtout de laine carmélite, et attendit. La maison, qui s’adossait contre le mur mitoyen, et dont le toit d’ardoises se voyait seul de la rue, était lézardée, branlante et toute rongée de mousse. Cette maison devait être vieille déjà du temps de la Ligue ; elle avait l’apparence