Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/107

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empêcher Magnus et Carquefou de persévérer dans leurs desseins, et s’ils pensaient par hasard aux périls dont leur entreprise était semée, c’était seulement dans la crainte qu’un accident ne leur permît pas d’y consacrer tout leur temps et tous leurs soins.

Ils exploraient chaque bourg, chaque village, chaque hameau ; le passage de Matheus n’avait pas laissé plus de trace que la fuite d’une anguille entre les roseaux d’un étang. Ces nouvelles déconvenues, bien loin d’abattre la résolution de Magnus, avaient pour effet de l’exaspérer. Il ne pouvait prononcer le nom de Matheus Orlscopp sans pâlir. Jamais haine pareille n’avait mordu son cœur.

Un soir qu’il dépêchait à la hâte un morceau de pain et une tranche de viande froide à la porte d’une taverne, Magnus remarqua une espèce de soldat qui le considérait attentivement. Le vieux reître, qui ne cherchait qu’une occasion d’interroger les gens, se dirigeait déjà vers le soldat, lorsque celui-ci se levant :

— Par hasard, camarade, dit-il, n’étiez-vous point à l’hôtellerie d’un coquin qu’on appelle maître Innocent, et n’y soupiez-vous pas avec deux gentilshommes le mois dernier ?

— Si vraiment… Les connaissez-vous ?… savez-vous où ils sont ? s’écria Magnus.

— Je les connais pour de braves soldats… et moi qui ai contribué à les garrotter, ils m’intéressent plus que je ne saurais le dire.

— Ah ! vous étiez avec Mathéus Orlscoop ! dit Magnus, qui mit la main sur la garde de Baliverne.

— Eh ! là ! là ! ne nous fâchons pas ! Je vous dis que ces braves jeunes gens m’ont gagné le cœur par leur vaillante humeur. Quant à ce Mathéus, c’est un bandit auquel je ne serais pas fâché de jouer un méchant tour… Il y avait dix pièces