Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/160

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— Ah ! votre dévouement n’a pas de limites !

— Perdues ici-bas par leur obstination, faudra-t-il encore qu’elles soient perdues Là-Haut ? Vous ne sauriez croire combien cette pensée désolante me poursuit !… Elle ne me laisse pas une heure de repos ! Ah ! je tenterais l’impossible pour leur salut.

— Vous avez toutes les grâces et toutes les séductions ! Dieu a donné à votre âme immortelle une prison terrestre qui fait penser aux anges.

Thécla oublia sa main dans celle de Wallenstein et parut tomber dans une rêverie profonde. Le duc de Friedland la contemplait et l’admirait.

— Ah ! dit-elle tout à coup en relevant sa tête languissante, j’ai quelquefois pensé que si la lumière de notre sainte religion éclairait leurs âmes, Mlle de Pardaillan et Mlle de Souvigny seraient moins rebelles à mes instances.

— Vous avez là une sainte pensée. Les austères silences d’un couvent apprendraient la soumission à ces âmes où les détestables doctrines de la réforme ont porté le trouble et l’esprit de révolte.

— Vous m’approuveriez donc, mon cher duc, si, dans le but de les ramener à la connaissance de la vérité, je les plaçais l’une et l’autre sous la direction d’un homme pieux qui les éloignerait du théâtre du monde ?

— Je vous en donnerais le conseil. Quand la mansuétude ne peut plus rien, quand les voies de la douceur sont épuisées, il faut recourir au châtiment, comme on emploie le fer et le feu pour extirper les ronces et les broussailles d’un champ où doit passer la charrue.

— Vous dirai-je toute ma crainte ? J’ai craint un instant que vous n’eussiez la pensée de les ravir à ma tendresse alarmée. M’autorisez-vous à tout faire pour les ramener au