Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/23

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Devant la poterne, encombrée de cadavres, et arc-bouté sur ses robustes jambes, Magnus faisait tournoyer autour de sa tête un mousquet dont il se servait comme d’une massue ; chaque fois que l’arme sanglante traçait un cercle, un homme tombait ; autour de lui le vide se faisait.

— Notre salut est là ! reprit Carquefou, qui de la main désignait Magnus aux regards de Renaud.

Mais la fièvre de la bataille enivrait M. de Chaufontaine.

— Au diable cette guenille ! cria-t-il.

Et, arrachant sa ceinture verte, l’épée haute, il fondit sur un capitaine de lansquenets.

Déjà M. de la Guerche était aux prises avec deux impériaux qui lui barraient le passage de la poterne.

Magnus l’aperçut ; un bond terrible le porta au milieu même des Autrichiens, et le mousquet tout rouge de sang abattit deux nouvelles victimes. Une poignée d’hommes déterminés l’avaient suivi. Le feu des remparts et des tours redoubla ; les assaillants reculèrent, et un large espace resta nu entre eux et la poterne.

— À moi ! cria Magnus.

Armand-Louis, Renaud, Carquefou, qui, tête baissée, frappait partout, le joignirent en un instant.

— À la poterne, à présent ! cria de nouveau Magnus.

— Il parle comme un sage ! grommela Carquefou, qui battait en retraite, l’épée au poing.

Mêlés aux débris de la garnison, un mouvement impétueux les poussa vers la poterne toute large ouverte, et derrière laquelle une troupe de Suédois se tenait prête à les recevoir. En ce moment, Jean de Werth les reconnut tous trois.

— Ah ! les bandits ! cria-t-il.

D’un coup d’œil il mesura la distance qui le séparait des fugitifs ; ils étaient trop loin déjà pour qu’il pût conserver l’espoir de les atteindre.