Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/236

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Yerta fit quelques pas du côté de la forêt. Patricio la suivait toujours. Elle ne le regardait plus.

— Mais cette clé et ce mot d’ordre, pour quoi faire ? reprit-il.

— Pourquoi ? dit Yerta, qui marchait lentement. J’avais fait un rêve, il me semblait qu’avec cette clé on pouvait entrer à Drachenfeld, sans être vue, à l’heure où la nuit vient. La porte ouverte, avec le mot d’ordre on passait inconnue et rapide devant les sentinelles. Le matin, on s’échappait comme un oiseau qui part du nid, et mes frères de la tribu ne savaient pas qu’une bohémienne avait déserté sa tente.

— Yerta ! est-ce vrai ? me promettez-vous ?

— Moi, je ne promets rien. Mais, comme l’hirondelle, je vais et je viens. Un hasard peut me conduire au pied de ces murailles, un hasard peut m’en faire chercher la porte. Mais, pourquoi l’ouvrir, lorsque derrière ce fer et ce bois impénétrables se cache un capitaine prudent comme un lièvre et soupçonneux comme une anguille ? Ah ! Patricio Bempo, vous êtes comme ces incendies qui de loin brillent et sont tout en flammes. On accourt, et quand on arrive ce ne sont plus que des cendres.

— Yerta, voici la clé ! s’écria Patricio Bempo vaincu.

— La clé, c’est bien ; mais ce n’est pas tout. Il y a le mot d’ordre.

Patricio soupira comme un homme auquel une force supérieure fait violence :

— Dux et imperator ! dit-il.

Et, tombant aux genoux de Yerta, il cacha sa tête entre ses mains.