Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/26

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Malgré le formidable retentissement de cette lutte qui ensanglantait l’une des portes de Magdebourg, Adrienne et Diane, retirées alors au fond d’une petite pièce dont les étroites fenêtres donnaient sur un jardin, causaient silencieusement avec leurs pensées. Toutes deux remplissaient de charpie une large corbeille placée à leurs pieds. Quelquefois leurs mains s’arrêtaient, un soupir gonflait leur poitrine, et pensives elles regardaient le ciel.

Les détonations de l’artillerie se succédaient de minute en minute ; une clameur qui s’élevait de la rue voisine leur apprenait tout à coup qu’on rapportait un blessé à sa famille. Alors elles tressaillaient et reprenaient leur travail pieux un instant interrompu par le rêve.

Cependant le silence s’était fait ; on n’entendait plus que par intervalle la décharge d’une pièce de canon qui répondait aux derniers efforts de la bataille. En ce moment, des bruits de pas retentirent dans la rue, et presque aussitôt le heurtoir de la porte tombait sur le bouton de fer.

— Entends-tu ? cria Adrienne, qui sauta sur sa chaise.

— C’est Magnus, répondit Diane, qui se sentait pâlir.

— C’est lui, reprit Mlle de Souvigny, mais il n’est pas seul… Qui peut être avec lui ?… Qui peut venir ici ?

Cependant des pas précipités montaient l’escalier.

— Dieu bon ! tu n’as pas exaucé nos prières ! s’écria Diane.

— Ah ! tu les as reconnus comme moi… C’est Armand !

— C’est Renaud !

La porte s’ouvrit, et quatre hommes tout couverts de vêtements souillés de poudre et de sang se précipitèrent dans la chambre. Avant même qu’elles pussent jeter un cri, Armand et Renaud étaient aux pieds d’Adrienne et de Diane.