Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/273

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aux postes que M. de la Guerche avait assignés d’avance à ses camarades. Une sentinelle avait donné l’alarme. Dans l’ombre, on voyait au loin, et vaguement, s’agiter une cohue de cavalerie. Un bruit sourd de hennissement, mêlés au cliquetis des armes, arrivait jusqu’au village.

Une compagnie de mousquetaires s’approcha silencieusement, et une grêle de balles pénétra dans l’abatis, faisant voler les menues branches et l’écorce des arbres.

— Voici Jean de Werth, tirons bas ! dit Magnus.

Les dragons firent feu à leur tour. Une douzaine de chevaux et d’hommes tombèrent sur le chemin ; la compagnie, mise en désarroi, battit en retraite.

Tout rentra dans le silence.

M. de Collonges sortit en éclaireur du village. Il revint au bout d’une heure et annonça que la route était occupée par un corps de troupes.

— Si nous n’avions pas demain sur les bras deux mille diables à ceintures vertes, dit-il, cela m’étonnerait fort.

— L’attaque n’est pas ce qui m’occupe, c’est la retraite, dit Magnus.

Son regard rencontra celui de M. de la Guerche.

— Oui, oui, dit le vieux soldat, l’attaque sera repoussée, et Jean de Werth, que l’enfer confonde, laissera bon nombre des siens devant ces abatis ; mais, si nous quittons le village, nous retrouverons le Bavarois en rase campagne, au delà de la forêt, avant une heure, et nous serons un contre dix.

— Parbleu ! que risquons-nous ? Ils ne nous prendront pas vivants ! dit M. de Saint-Paer.

— Nous, c’est vrai ; mais sommes-nous seuls ? murmura M. de la Guerche.

Et il tourna les yeux du côté de la maison où Mlle de Souvigny et Mlle de Pardaillan s’étaient retirées.