Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/299

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— Encore une heure de cette vie émaillée de balles, et la fièvre me tuait, dit-il.

Presque aussitôt le garde arriva portant des torches. Il en alluma une, et, s’approchant de M. de la Guerche :

— Divisez vos soldats en pelotons de vingt hommes, dit-il, et que chacun de ceux qui marchent en tête des pelotons s’arme d’une torche.

Les rangs de l’escadron se rompirent, et chaque peloton se forma en silence.

— À présent, suivez-moi, reprit Asa.

Il prit la tête de la colonne et se dirigea vers le marais, qui faisait au village une ceinture de joncs et de roseaux. Quelque temps, il chercha sur les bords où l’eau dormante s’aplatissait ; puis, s’arrêtant auprès d’un saule éventré :

— C’est ici, dit-il.

Se tournant alors du côté de M. de la Guerche et montrant le marais, dont la surface, couverte çà et là d’herbes ? et de glaïeuls, ondulait sous le souffle du vent :

— Le chemin du salut est là devant nous ; nul ne le connaît que moi, reprit-il. Je vais m’y engager le premier ; ces deux jeunes femmes me suivront ; les hommes viendront après.

— Et moi je passerai le dernier, dit M. de la Guerche.

— Que chacun de vous ait grand soin de faire marcher son cheval sur les traces du mien, reprit Asa. Si l’un de vous s’écartait du chemin que je suis, il disparaîtrait dans un gouffre. Le sentier n’est pas large, un homme seul peut y passer de front. Que vos oreilles et vos yeux restent ouverts. Tout ce que la vigilance peut garantir, je le promets, le reste appartient à Dieu.

— Mais ces torches ne révèleront-elles pas notre marche ? dit M. de Collonges.

— Regardez les feux qui courent sur le marais. Combien de