Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/316

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L’ordre de monter à cheval passa doucement de bouche en bouche. Chaque dragon quitta tour à tour son poste de combat. Armand-Louis, Renaud, Magnus et Carquefou se levèrent les derniers sans bruit. Ils soupirèrent en regardant ceux qui ne les imitaient pas ; ils savaient que ceux-là ne se relèveraient jamais.

M. de Voiras et M. de Collonges étaient à cheval : celui-là courbé sur sa selle, la main serrée autour du pommeau ; l’autre ferme, souriant, la tête haute.

On prit la bride des montures de ceux qui étaient morts, et Armand-Louis, qui restait en arrière, donna le signal du départ.

Vingt hommes seulement se mirent en route ; trente dormaient du sommeil éternel, la face tournée vers le ciel.

Les dragons laissaient derrière eux une muraille infranchissable à la cavalerie ; mais, depuis que la nuit était venue, Jean de Werth, qui craignait une fuite semblable à celle qui les avait sauvés une première fois, lançait de quart d’heure en quart d’heure quelques hommes déterminés contre la barricade. Il jugeait de la présence des huguenots par les coups qu’ils portaient aux siens.

La troupe ébranlée, Armand-Louis fit signe à Renaud, à Magnus et à Carquefou. Tous quatre revinrent sur leurs pas et se blottirent dans les anfractuosités du rocher au moment où un léger bruit leur donnait à penser qu’un nouvel assaut allait être tenté.

L’œil aux aguets, ils virent des ombres se mouvoir le long du défilé et s’approcher silencieusement de leur abri.

— Feu ! cria tout à coup M. de la Guerche.

Quatre coups partirent, quatre ombres s’effacèrent. D’autres mousquets arrachés aux mains de ceux qui ne respiraient plus servirent à de nouvelles décharges. Les assaillants reculèrent.