Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/38

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sourde s’éleva dans l’éloignement : c’était une rumeur lente, continue comme celle que ferait un corps de troupes en marche.

Magnus, à qui son inquiétude défendait le repos, et qui rôdait le long des portes, poussa une sentinelle du pied.

— N’entendez-vous rien ? dit-il.

La sentinelle prêta l’oreille une seconde et partit d’un éclat de rire.

— C’est la cavalerie croate qui s’en va ; bon voyage ! dit-elle.

Et, appuyant sa tête sur le dos d’un camarade qui ronflait, la sentinelle ferma les yeux.

Le même bruit roulait toujours dans l’espace. Un instant, il parut à Magnus que ce bruit s’éloignait.

« C’est quelque diablerie », pensa-t-il.

Une ligne blanche qui ondulait de l’autre côté de l’Elbe, lui fit croire, en effet, qu’un corps de cavalerie quittait le campement de l’armée impériale.

— Le comte de Tilly battrait-il véritablement en retraite ? murmura Magnus. On dit cependant que c’est un bon général, et je l’ai vu à l’œuvre.

Il monta sur la crête du rempart et regarda au loin.

Rien ne troublait la profonde tranquillité de ces campagnes dévastées ; pas un homme ne s’y montrait ; mais, en cherchant bien, Magnus crut distinguer, dans l’épaisseur d’un taillis dont les broussailles couvraient un pan de l’horizon, les mouvements incertains d’une troupe de soldats. Il lui semblait, en outre, qu’une ligne mince et noire, d’où sortaient quelques éclairs, rampait dans les sinuosités d’un chemin creux.

Le soleil se leva et inonda la plaine de ses rayons. Un homme parut alors au bout d’un sentier, courant à perdre haleine,