Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/219

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Le comte lui fut extrêmement reconnaissant de cet expédient.

Dans quelle position se fût-il trouvé, en effet ! passer dans une ville de province pour héros d’une pareille aventure, qui n’aurait peut-être pas tardé à parvenir aux oreilles de sa Mathilde ! Il baisa les mains de sa protectrice, se constitua son prisonnier pour toute la journée, et se laissa conduire par elle dans un adorable petit cabinet.

Il avait vue sur le plus charmant jardin de la ville. Mais il y en avait un plus charmant encore qui, partant du bord de la fenêtre s’avançait jusque dans la chambre, et répandait une odeur printanière d’une douceur indicible. Les parois de la chambre étaient ornées de roses qu’on aurait crues d’or ; par terre, tout ce qui n’était pas tapis était des divans de couleurs variées. De doux carillons, harmonieusement accordés, étaient mis en mouvement par des oiseaux qui les faisaient sonner en venant prendre leur nourriture. Dans un bassin de cristal, se jouait une foule de poissons dorés qui accouraient à la surface recevoir la becquée de canaris apprivoisés, et que la société des hommes avait rendus aimables, jusque pour les habitants d’un autre élément. Ces petites bêtes faisaient l’admiration du comte.