Page:Acker - Petites Confessions, sér1, éd3.djvu/97

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mouvement que nous avons créé n’est pas de ceux qui meurent aussitôt nés : il grandit, lentement peut-être, mais sûrement, à travers les profondeurs du peuple, là où se cachent les énergies les meilleures. Je voudrais que vous les vissiez, ces jeunes gens qui m’aident de leur intelligence, de leur force, et aussi de leur sang. Et, vraiment, nous conquérons la masse. Nous sommes suspects aux réactionnaires, à cause de nos opinions socialistes, et les socialistes nous traitent de calotins parce que nous allons à la messe. Nous sommes seuls. Et pourtant chaque jour nous amène des adhérents, des ouvriers, des commis, des employés. Tenez ! lors de la fameuse manifestation des anticléricaux sur la place de la Concorde, l’an dernier, beaucoup d’églantinards, spontanément, me serrèrent la main. Combien parmi eux n’ont pas encore nos idées, mais nous respectent et nous admirent ! Nous arracherons la masse au joug des politiciens, je n’en doute plus, car la masse comprend déjà que nous servons la France, sans laquelle l’humanité est impossible.

Machinalement, M. Marc Sangnier me demanda encore : « Comprenez-vous ? » Mais je ne lui répondis point, car je venais de voir ce qu’il y a de plus beau parmi les hommes, un apôtre, et le moindre mot que j’eusse pu prononcer eût été misérable.