Page:Adam - Le Serpent noir (1905).djvu/173

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i68 » J un sauveur Noni I livres ? Ils se parlent avec franchise et conliance ;ils se communiquent leurs idées sur les choses, les êtres et l’univers. Mais n’est-ce pas la ce que je fais, ce que font aussi les amis, les convives d‘une même table, les habitués d’un même salon, les hôtes d’une même maison, pourvu qu`ils se soient plu quelques heures? Alors que gagnerait-on si l'on mélait a cela ce que les sots nomment l’amour ? Moins que rien... De pau- vres caresses vulgaires etinutiles, des sentiments ar- titiciels et déclamatoires, les rengaines de tous les ri-. ° meurs, moins de réserve l’un devant l’autre, par- tant plus de grosssièretén. Ne le croyez-vous pas aussi? Je la supposai en humeur de séduire, tant elle dis- courait avec gràce, tant elle appuyait ses paroles de gestes choisis et délicats. Elle avait ôté -sa capeline de dentelle et masse longuement le poids de sa cheve- lure au faite de son visage linéaire. Était-il possible que tant d’art fût employé sans vouloir me tenter ‘? Je ne le pensai pas. Si nous eussions été seuls, elle et moi, j‘aurais pris mon élan et l’eusse proprement terrassée. A lire cette envie dans ma mine, elle sourit et s'attrista. —-· L’am0ur... — affirma-t-elle, apres un silence ou nous mesurions la portée de ce que nous allions dire, —- l’amour n’ajoute a l'amitié que si les deux êtres . peuvent passer leurs existences ensemble, unis, ma- riés. Alors, ils essayent de perpétuer leurs âmes, de- venues leur ame, dans une descendance qu’ils édu- quent selon leur 'idéal. C’est une œuvre. Ils construi- sent ainsi l’avenir a leur image, comme Dieu fit le monde... Mais aucune autre combinaison n’assure aux partenaires des joies qui compensent l’ennui de