Page:Adam - Le Serpent noir (1905).djvu/394

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· LE senrmr mom ` 389 Cela d’un tel accent, que sa femme et moi, nous nous interrogeâmes des yeux, elle, anxieuse, blème. Luron, luron, lurette! Luron, luron, Iuré!... '— cria-t-il selon le refrain entonné par toutes les bouches brutales. Sans nul doute il avait chanté en appliquant a son destin méme, par une claire allusion, le sens de la cantilene. Il ne savait pas nager dans Pélément t terrible ou les hommes en lutte pressent le faible, t comme les vagues de l’océan pressent et noient le naufragé. Déjà la mort lui mangeait le cœur... "Voila ce qu’il avait voulu crier de sa détresse. Voilà _ ce que comprenait Mm Goulven; car la pitié et la . douleur mouillèrent ses yeux, autant—que je pus le deviner dans la pénombre crépusculaire. D’ailleurs il ne 'permit pas à nos regards de fouiller les siens. ll s’obstinait a entendre seulement les chanteurs que berçait la nef, ai voir seulement le feu qui s’alluma ' devant nous, écarlate, ami phare de la Teignouse, dressé sur le roc, entre le vert lumineux des eaux et la courbe plus verte du ürmament. _ · Le corps mince de Goulven souffrait dans l’étui d’un long paletot brun; et ses pieds en vieilles bottines jaunes se crispaient l’un sur l’autre. Le capitaine empoigne lui—méme la barre pour doubler le récif; le soin de son art l'absorba. En sorte qu’à cette extré- mité de la passerelle.nous étions, tous trois isolés. La grande ·brise emportait loin des oreilles indiffé- rentes les paroles que prononça M¤ï° Goulven, alors: · ——- Ecoute, Jean... écoute... Tu es malheureux... Tu es malade... Promets-moi que tu vas te reposer en ' rentrant... N’est-ce_pas, monsieur Guichardot, il faut 22.