Page:Adam - Mes premières armes littéraires et politiques.djvu/185

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Louis Ménard, qui l’admirait comme un fils des pays de lumière, l’accusait a certains jours de poser « en normalien ». Ce soir-la, il fut le vrai Saint-Victor, celui qu’il était comme écrivain : lettré délicat, artiste, causeur « athénien », sans pédanterie aucune, malgré son incomparable savoir.

En Louis Ménard il y avait de cinq à dix personnages, chacun autre que les autres. D’abord et avant tout le parnassien, le poète des altitudes sacrées, l’explorateur du mont inaccessible qui fend les nuages pour trouer de sa crête la sphère astrale de l’Empyrée, puis il y avait le chimiste, l’observateur, l’inventeur génial, et encore l’homme politique, l’insurgé en permanence, toujours prêt à participer aux émeutes, amoureux des anarchies antiques, auxquelles il attribuait les éclosions d’art du passé. Exilé après juin 1848, il n’était rentré d’Angleterre que l’Empire fait.

Ménard, en outre, était peintre, élève de Rousseau, de Troyon, et remarqué aux expositions. Enfin, pour résumer plusieurs de ses facultés, Ménard était philosophe, puis critique, historien et païen. Ce soir-là, il nous dit qu’il « bûchait » son doctorat es lettres pour « piocher » ensuite son doctorat en droit.

Au Salon, Ronchaud nous avait fait admirer ses Châtaigniers, Cerfs et Biches, dont le succès s’affirmait ; nous l’en félicitions, Mme d’Agoult et moi. Courbet à côté de lui paraissait brutal.