Page:Adam - Mes premières armes littéraires et politiques.djvu/232

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m’écriai-je, mais c’est du Français ancestral.

— Tout simplement.

— Moi, dit Saint-Victor, que les monologues de Ménard impatientaient, je suis convaincu qu’on ne comprend rien de rien à une langue quand on ne l’a pas vécue des années durant comme nous faisons du grec et du latin, et encore. Les mots sont la physionomie des choses, et il faut avoir beaucoup lu dans les choses pour lire dans les mots. Je trouve amado au lieu d’aimée et fenestroun à la place de fenêtre, du patois, c’est-à-dire du français mal prononcé. Voyez-vous, le français pense à la française, c’est-à-dire imbibé séculairement de grec, de latin, est suffisant, et à mon avis ce qu’il y a encore de mieux. Pourquoi aller chercher autre chose en France ? Mistral, Aubanel, Roumanille, qui sont, je le reconnais, de vrais poètes, feraient mieux d’écrire leurs vers en pur français, pour nous d’abord, quitte à traduire ensuite ce français en provençal pour leurs paysans.

— Saint-Victor, dit Ménard, vous êtes un béotien.

— Pas du tout, au contraire, c’est moi qui reste athénien. »

Un soir, rue de Vaugirard, chez la comtesse de Charnacé, fille du comte et de la comtesse