Page:Adam - Souvenirs d’un musicien.djvu/224

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siciens qui ne sont nullement partisans de cette musique.

— Fadaise ! disait le fermier général, c’est qu’ils sont eux-mêmes parties intéressées.

— Interrogeons l’un d’eux ! s’écrie le prince de Conti.

Justement Campra vint à passer. C’était un homme juste, et qui heureusement n’avait pris aucune part aux cabales dirigées contre Rameau.

— Eh ! bien, que pensez-vous de cela ? lui dit le prince.

— Monseigneur, répondit le musicien, il y a dans cet opéra assez de musique pour en faire dix comme ceux qu’on nous représente tous les jours. Cet homme-là nous éclipsera tous.

Le mot courut, fit fortune, et à la deuxième représentation, des beautés toutes nouvelles se révélèrent aux auditeurs attentifs. Le succès fut moins grand qu’à la troisième, qu’à la quatrième, qu’a toutes les représentations suivantes.

L’ouvrage fut joué trente fois de suite avec un applaudissement universel, et Rameau consolé ne renonça pas au théâtre, car il donna plus de vingt-trois ouvrages, tant opéras que ballets.

Après le grand succès d’Hippolyte et Aricie, le pauvre organiste était devenu un homme trop célèbre pour conserver sa modeste retraite de la rue du Chantre, et ce fut avec une véritable peine que M. Bazin, dont l’estime pour son locataire croissait à mesure que celui-ci s’élevait davantage, apprit un